Corruption active et passive : définition, différences et enjeux juridiques pour les entreprises.

L’avilissement touche plusieurs secteurs d’activités et pose des défis majeurs pour les organisations, particulièrement au sein d’un environnement globalisé et de plus en plus régulé. En ce qui concerne le droit pénal des affaires, nous distinguons deux types de comportements : la corruption active et la corruption passive.

En quoi ça consiste ?

La corruption active

Ce type de corruption est définie par le code pénal comme étant le fait pour une personne, directement ou indirectement, de proposer, de promettre, ou d’octroyer un avantage indu à une personne exerçant une fonction publique ou privée, dans le but d’influencer l’accomplissement d’un acte relevant de ses fonctions. Cette infraction part d’une initiative de la personne corrompue, qui cherche à influencer l’action ou la décision d’un autre, en échange d’un avantage.

En France, la corruption active est notamment réprimée par les articles 433-1 et suivants du code pénal. Elle concerne tant les fonctionnaires que les personnes exerçant une activité privée, comme dans le cadre de transactions commerciales.

Les actes de corruption sont souvent associés à des infractions connexes, comme : 

  • Trafic d’influence : Lorsque la personne corrompue utilise son influence réelle ou supposée pour obtenir une décision favorable d’une autorité publique.

  • Blanchiment d’argent : En cas de dissimulation ou de réinvestissement des sommes obtenues par des pratiques corruptives.

  • Détournement de fonds publics : Quand la corruption implique l’utilisation illicite de ressources publiques.

La corruption passive

Ce type de corruption est, quant à elle, définie comme l’acte, pour un agent public ou privé, d’accepter ou de solliciter des avantages indus en échange de l’accomplissement ou de l’abstention d’un acte lié à ses fonctions.

Un fonctionnaire qui accepte une proposition de pot-de-vin en échange d’un service comme l’attribution d’un contrat public est coupable de corruption passive. Ce type de comportement est également incriminé par les articles 432-11 et suivants du code pénal, pour les agents publics, et par les articles 445-1 pour le secteur privé.

Les différences entre ces deux types de corruptions

Les mécanismes juridiques

Les mécanismes juridiques qui encadrent la corruption active et passive reposent sur des principes distincts, bien qu’ils soient souvent couverts par les mêmes textes de loi en matière de lutte contre l’avilissement. Chaque type de corruption engage des promesses, des avantages et des responsabilités pour l’auteur de l’infraction.

  • Corruption active : Il d’agit de l’acte initié par le corrupteur, c’est-à-dire l’auteur ou l’entité qui propose ou offre un avantage indu pour influencer une décision ou un acte. Dans ce contexte, la mission de l’auteur est détourner la procédure à son avantage. Le mécanisme juridique se concentre sur la tentative ou l’accomplissement de cet acte d’avilissement. Dans ce cas, la législation prévoit généralement des sanctions contre l’offre ou la promesse d’un tel service, indépendamment de son acceptation ou de la réalisation de l’acte corrompu.

  • Corruption passive : Contrairement à la corruption active, elle se focalise sur la personne qui accepte ou reçoit l’avantage indu. Le récepteur, qui peut être un agent public ou privé, est sanctionné pour avoir abusé de sa position en acceptant ces avantages en échange d’un acte ou d’une omission qui fausse la prise de décision. Les mécanismes juridiques régissant cette corruption sont souvent identiques à ceux de la corruption active, mais se concentrent sur la partie « réceptive » du processus.

Les enjeux de conformité pour les entreprises

Pour une société, les enjeux liés à ces corruptions sont considérables. L’implication dans l’une ou l’autre forme d’avilissement, même indirectement, peut entraîner des conséquences désastreuses, tant sur le plan légal que sur celui de la réputation.

  • Obligation de conformité : Les sociétés doivent se conformer aux réglementations anti-corruption telles que le Foreign Corrupt Practices Act (FCPA)aux États-unis ou la norme Sapin II en France. Ces législations imposent aux sociétés de mettre en place des politiques de prévention et de contrôle, afin d’éviter que des actes d’avilissement, actifs ou passifs, ne soient commis par leurs employés ou partenaires commerciaux. Un conseil juridique spécialisé peut souvent être nécessaire pour élaborer des politiques internes efficaces.

  • Risques de sanction : En cas de manquement, les sociétés peuvent être tenues responsables des actes de leurs dirigeants, employés ou intermédiaires, et faire face à des amendes très lourdes, à des interdictions de participer aux marchés publics ou à des dommages financiers et moraux. Le recours à des avocats spécialisés en conformité peut aider les organisations à éviter ces risques en leur fournissant des conseils appropriés.

  • Réputation et confiance des parties prenantes : Une affaire de corruption, même s’il s’agit de corruption passive, peut ternir la réputation d’une société pendant de nombreuses années. La confiance des investisseurs, des partenaires commerciaux et des clients peut être gravement affectée, avec des répercussion à long terme sur la compétitivité de l’organisation. La gestion de la crise et les actions correctives sont essentielles pour regagner cette confiance, souvent avec l’accompagnement d’un service juridique ou d’un conseil en communication de crise.

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Cadre législatif national et international

En France

Loi sapin II (2016) : Cette norme est l’un des piliers du droit en matière de lutte contre l’avilissement en France. Elle impose aux organisations de plus de 500 salariés ou réalisant un chiffre d’affaires de plus de 100 millions d’euros de mettre en place un dispositif de prévention de la corruption, visant à éviter tout pacte de corruption entre un corrupteur et un corrompu.

Ce dispositif comprend :

  • L’élaboration d’un code de conduite intégré au règlement intérieur, fixant les règles et obligations en matière de lutte contre l’avilissement.

  • La mise en place d’un dispositif d’alerte interne pour permettre la remontée des informations relatives à des propositions de corruption ou autres délits en lien avec des situations de corruption.

  • Des cartographies des risques pour identifier les zones les plus vulnérables à l’avilissement au sein de l’entreprise, et ainsi prévenir tout acte illégal.

  • Des procédures de vérification de l’intégrité des tiers (clients, fournisseurs, intermédiaires) pour garantir la conformité avec le droit en vigueur..

  • Un programme de formation des collaborateurs exposés aux risques d’avilissement. Un dispositif de contrôle interne pour vérifier l’efficacité des mesures prises.

Cette norme a créé l’Agence Française Anticorruption (AFA), une autorité indépendante ayant pour mission de surveiller la bonne application des dispositifs de conformité anticorruption, d’accompagner les entreprises en matière de conseil et de sanctionner les manquement graves.

Code pénal : Ces deux types de corruptions sont sanctionnées par le code pénal français. Les articles 433-1 et suivants précisent les peines encourues pour tout délit de corruption. Ces sanctions incluent des peines pouvant aller jusqu’à 10 ans d’emprisonnement et un million d’euros d’amende, ou plus si l’amende est proportionnée aux gains réalisés grâce à l’avilissement. La jurisprudence française a ainsi consolidé les fondements du droit anticorruption, imposant des peines exemplaires aux auteurs de pactes corrupteurs.

Règlementation européenne : En tant que membre de l’Union européenne, la France se conforme également aux directives et règlements européens. La directive de 2019 sur la protection des lanceurs d’alerte a, par exemple, renforcé les droits des employés souhaitant dénoncer des pratiques illégales, y compris les délits d’avilissement. Les lanceurs d’alerte peuvent désormais signaler des abus dans des conditions qui garantissent la protection de leur identité, tout en aidant la justice à réprimer ces actes.

À l’international

Foreign Corrupt Practices Act (FCPA) – États-Unis : Promulgué en 1977, le FCPA est l’une des législations anticorruption les plus anciennes et les plus rigoureuses au niveau international. Il interdit aux sociétés américaines, ainsi qu’à toutes sociétés cotée aux États-Unis, de verser des pots-de-vin à des fonctionnaires étrangers pour obtenir ou conserver un marché. Il couvre ces deux types de corruption, et impose aux sociétés de tenir des comptabilités transparentes et de réaliser des audits internes pour vérifier leur conformité. Les amendes pour violation du FCPA peuvent atteindre des montants colossaux, et des peines de prison sont prévues pour les dirigeants impliqués. Dans ce cadre, le recours à un avocat expert en droit des affaires internationales devient souvent essentiel pour naviguer dans les méandres de cette législation.

UK Bribery Act -Royaume-Uni : Le UK Bribery Act, adopté en 2010, va encore plus loin que le FCPA américain en criminalisant non seulement les promesses ou propositions de corruption entre entités privées. La loi prévoit également une infraction spécifique pour les organisations qui échouent à prévenir l’avilissement en leur sein, plaçant une responsabilité directe sur les programmes de compliance. Les sociétés doivent donc prouver qu’elles ont mis en place des mesures de prévention efficaces pour éviter d’être tenues responsables. Ce texte s’applique même aux actes de corruption sans lien direct avec des autorités publiques. Ici encore, les organisation internationales doivent souvent s’appuyer sur un maître en droit pour s’assurer de leur conformité et éviter les répressions prévues par cette législation.

Convention de l’OCDE sur la lutte contre la corruption : Cette convention, adoptée en 1997, engage les pays membres à pénaliser la corruption d’agents publics étrangers. Cette convention établit des standards internationaux et encourage la coopération entre autorités judiciaires pour lutter contre les pratiques corruptrices à travers les frontières. Les organisations opérant à l’international doivent donc faire preuve d’une certaine vigilance pour se conformer et éviter les pactes corrupteurs qui pourraient engager leur responsabilité devant les tribunaux nationaux et internationaux.

Conséquences de la corruption active et passive

Risque pour les entreprises

Amendes et sanctions

Les sociétés reconnues coupables de corruption s’exposent à des amendes particulièrement élevées, en fonction de la gravité des faits et des législations en vigueur.

  • Amendes financières : Dans beaucoup de pays, la législation prévoit des amendes pouvant atteindre plusieurs millions d’euros, voire un pourcentage significatif du chiffre d’affaires annuels de l’entreprise. Exemple : Sous la loi Sapin II en France ou le Foreign Corrupt Practices Act( FCPA) aux États-Unis, les sociétés peuvent être tenues de payer des pénalités financières substantielles en cas de manquement à leurs obligations de conformité.

  • Sanctions supplémentaires : Outre les amendes, les sociétés peuvent être sujettes à des punitions additionnelles, telles que l’interdiction de participer aux marchés publics ou à certains appels d’offres pendant une période déterminée. Cela représente une perte de débouchés commerciaux majeurs, notamment pour les organisations opérant dans le secteur débouchés commerciaux majeurs, notamment pour les entreprises opérant dans le secteur des infrastructures ou de la prestation de services aux gouvernements.

  • Dommage collatéraux : Les sociétés peuvent également faire face à des poursuites civiles intentées par des actionnaires, partenaires commerciaux ou autres parties prenantes lésées par l’impact négatif d’une affaire d’avilissement sur leurs investissements ou leurs relations professionnelles.

Et au niveau réputationnel ?

  • Perte de confiance : Une affaire de corruption, qu’elle soit active ou passive, peut gravement entacher la réputation d’une entreprise. La confiance des clients, partenaires commerciaux et investisseurs peut être durablement affectée. Ce déficit de confiance peut mener à une baisse de la valeur boursière, voire à un désengagement des actionnaires.

  • Répercussions à long terme : Le maintien de relations commerciales devient également plus difficile à mesure que les clients et partenaires commerciaux hésitent à s’associer avec une entreprise impliquée dans des pratiques illégales. Les contrats existants peuvent être annulés, et les opportunités futures compromises.

  • Communication de crise : Dans de nombreux cas, une entreprise impliquée dans une scandale de corruption est contrainte d’investir massivement dans des campagnes de communication de crise pour limiter les dégâts sur son image, souvent avec un succès limité, car la méfiance des parties prenantes est difficile à restaurer.

Risque pour les individus

Poursuite pénales contre les dirigeants et employés

  • Emprisonnement : En fonction de la gravité des actes et des juridictions, les individus reconnus coupables de corruption active ou passive risquent des peines d’emprisonnement allant de plusieurs mois à plus de 10 ans. Dans certains pays, comme les États-Unis ou le Royaume-Uni, les punitions peuvent être très sévères pour dissuader toute tentative future.

  • Amendes individuelles : Outre les peines d’emprisonnement, les individus qui ont commit un délit peuvent également être condamnés à payer des amendes personnelles, particulièrement dans le cadre de la lutte contre l’avilissement transnationale, où les sanctions sont renforcées. Ces amendes visent à pénaliser personnellement les individus, indépendamment des punitions financières imposées à l’entreprise.

  • Casier judiciaire : Une condamnation pour corruption entraîne un casier judiciaire, ce qui complique les perspectives futures des personnes condamnées, tant dans leur vie professionnelles que personnelle, et rend souvent nécessaire l’accompagnement d’un avocat pour gérer les conséquences légales et administratives.

Effets sur la carrière professionnelle

  • Interdictions professionnelles : Dans certains cas, les dirigeants et responsables reconnus coupables d’avilissement peuvent être frappés d’une interdiction d’exercer leur profession, que ce soit dans le secteur public ou privé. Cela peut les empêcher de travailler dans des industries réglementées ou d’occuper des postes de direction, de contrôle ou de gestion.

  • Impact sur l’employabilité : La corruption laisse une marque indélébile sur le parcours professionnel d’un individu. Même après avoir purgé leur peine, les personnes condamnées pour corruption voient leur employabilité gravement compromise. La méfiance envers leurs compétences et leur intégrité rend difficile la réinsertion dans des fonctions de responsabilité.

  • Perte de droits civiques : Dans certains pays, une condamnation pour corruption peut entraîner la perte de droits civiques, tels que l’interdiction de voter ou d’occuper des fonctions publiques. Ces sanctions symboliques renforcent la gravité des actes d’avilissement et soulignent la nécessité de respecter les normes éthiques.

Mais du coup, comment ça se passe pour les entreprises ?

Pour les sociétés travaillant à l’international, le respect des diverses législations anticorruption représente un enjeu stratégique important. Elles doivent se conformer aux réglementations de chaque pays dans lequel elles exercent des activités, sous peine de lourdes sanctions. Cela induit la mise en place de politiques de conformité et la réalisation d’audits pour assurer la transparence et l’intégrité de leurs pratiques commerciales.

Compliance (conformité) :

Les sociétés multinationales doivent élaborer et mettre en oeuvre des programmes de compliance adaptés aux exigences locales et internationales.

Cela implique :

  • La mise en place de codes de conduite anticorruption spécifiques à chaque juridiction.

  • Des formations pour sensibiliser les employés aux risques de corruption et aux conséquences légales.

  • Des procédures de vérification de l’intégrité des tiers avec lesquels elles traitent, notamment les fournisseurs, distributeurs et partenaires commerciaux.

  • La mise en place de canaux de signalement sécurisés et anonymes permettant aux employés et partenaires de signaler des actes suspects sans crainte de représailles.

Audits et contrôles internes : Les organisations sont également tenues de réaliser des audits internes réguliers pour éviter la conformité de leurs pratiques avec les législation anticorruption. Ces audits permettent de détecter les éventuels manquements et de corriger les failles dans les systèmes de contrôle interne.

  • Les audits peuvent inclure de vérifications comptables pour s’assurer qu’aucun paiement illicite n’a été effectué et qu’aucune opération suspecte n’a échappé aux contrôles.

  • Les systèmes de monitoring doivent être conçus pour détecter et prévenir tout comportement à risque, en particulier dans les opérations internationales où les risques de corruption sont plus élevés.

Coordination avec les autorités régulatrices : En cas de suspicion de corruption les entreprises doivent être en mesure de coopérer avec les autorités locales et internationales, notamment en fournissant les informations requises lors des enquêtes. Les sociétés qui collaborent pleinement peuvent parfois bénéficier de réductions de peine ou d’amendes réduites, à condition d’avoir mis en place des programmes de conformité solides.

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